Histoire de Chasse
Charges Insolites
Je me remémore ici quelques souvenirs de charges des plus insolites, de quoi remettre en question auprès de mes fidèles clients, toute ma réputation.
La toute première date d’une vingtaine d’années, lorsque je débutais professionnellement. Je me souviens d’un chasseur originaire du nord de la France. Nous approchions avec toute l’application qu’un céphalophe de Grimm l’exige…
Soudain, une agression venue du ciel, sous la forme d’un oiseau noir, pas plus gros qu’une grive, sans doute pour avoir malencontreusement frôlé son nid, m’assaillit assidûment de coups de bec. Je me défendis à grands gestes, l’arme vaine, provoquant la fuite de notre proie très inquiétée par ma pantomime. Un sentiment de ridicule persiste encore dans ma mémoire, moi qui me construisais déjà « l’aura » d’un « Grand guide de… Grande chasse »…
La toute première date d’une vingtaine d’années, lorsque je débutais professionnellement. Je me souviens d’un chasseur originaire du nord de la France. Nous approchions avec toute l’application qu’un céphalophe de Grimm l’exige…
Soudain, une agression venue du ciel, sous la forme d’un oiseau noir, pas plus gros qu’une grive, sans doute pour avoir malencontreusement frôlé son nid, m’assaillit assidûment de coups de bec. Je me défendis à grands gestes, l’arme vaine, provoquant la fuite de notre proie très inquiétée par ma pantomime. Un sentiment de ridicule persiste encore dans ma mémoire, moi qui me construisais déjà « l’aura » d’un « Grand guide de… Grande chasse »…
Ma deuxième attaque ne fut pas moins grotesque… Un après-midi, je rabattais à l’aide de pisteurs chevronnés, quelques timides pintades vers les fusils impatients de chasseurs en dilettante, postés au bord du Faro. Une colonie de colobes guéréza effarouchés par notre progression bruyante, jouait les trapézistes au- dessus de nos têtes. À mon insu, l’un d’eux, hargneux, se laissa tomber sur moi. Stupeur ! Désarmé, je m’écartai de justesse en cherchant de quoi me défendre. Je trouvai un morceau de bois mort suffisamment dissuasif pour faire face. Rassuré psychologiquement, je m’en emparai le brandissant et hurlant. Spectateurs à mes dépens, les pisteurs se tordirent de rire. Devant ma détermination, l’agresseur abandonna la confrontation pour se retourner contre l’un d’entre eux. Après un geste d’hésitation, ce dernier prit ses jambes à son cou. Cette situation burlesque me rendit à mon tour hilare. Le colobe exténué ravisa sa hargne due certainement à un trop plein de testostérone. Toute cette agitation effraya les pintades qui s’envolèrent vers la réserve, traversant la rivière sans que les bouches des canons ne vomissent leurs billes de plomb…
Ma deuxième attaque ne fut pas moins grotesque… Un après-midi, je rabattais à l’aide de pisteurs chevronnés, quelques timides pintades vers les fusils impatients de chasseurs en dilettante, postés au bord du Faro. Une colonie de colobes guéréza effarouchés par notre progression bruyante, jouait les trapézistes au- dessus de nos têtes. À mon insu, l’un d’eux, hargneux, se laissa tomber sur moi. Stupeur ! Désarmé, je m’écartai de justesse en cherchant de quoi me défendre. Je trouvai un morceau de bois mort suffisamment dissuasif pour faire face. Rassuré psychologiquement, je m’en emparai le brandissant et hurlant. Spectateurs à mes dépens, les pisteurs se tordirent de rire. Devant ma détermination, l’agresseur abandonna la confrontation pour se retourner contre l’un d’entre eux. Après un geste d’hésitation, ce dernier prit ses jambes à son cou. Cette situation burlesque me rendit à mon tour hilare. Le colobe exténué ravisa sa hargne due certainement à un trop plein de testostérone. Toute cette agitation effraya les pintades qui s’envolèrent vers la réserve, traversant la rivière sans que les bouches des canons ne vomissent leurs billes de plomb…
Puis vint l’expérience des charges de buffles, hippopotames, lions et éléphants. Personnellement, leur mauvais caractère me semble surfait.
On leur reconnaît surtout un instinct d’autodéfense. Seul un petit pourcentage possède une personnalité agressive et peut provoquer quelque inquiétude. Inutile de ressasser ce que de nombreux guides reconnus ont déjà pu écrire… Pour ne pas effrayer mes lecteurs, hôtes potentiels, je leur épargnerai mes anecdotes professionnelles. Par contre je conterai ici ma toute première expérience au buffle.
J’avais environ quatorze ans et comme à chaque congé scolaire, je rejoignais le paradis sur terre : le campement de chasse de mon père, installé au bord du mythique Faro.
Accompagné du fils d’un pisteur, je marchais inconsciemment dans les traces de mon géniteur.
Un matin très tôt, je m’éloigne du camp et tombe très vite sur un splendide buffle solitaire. Je vise le défaut de l’épaule et tire, armé d’une 6,5X58… Le buffle « piqué », réagit. Il se retourne et nous cherche du regard. Hamadjoda, à peine plus âgé que moi, m’indique avec insistance un arbre sur lequel nous serions en sécurité… Il me presse pour que j’y grimpe. Toute cette scène sous l’oeil ahuri de notre buffle qui s’impatiente. Paniqués et inexpérimentés, nous nous hissons hors d’atteinte. Je prends l’initiative de tirer dans cette position inconfortable. Le buffle s’avance alors vers nous à la fois agacé et étonné. Je double sur son poitrail. Le buffle encaisse et se fige. Des bulles ensanglantées émergent de ses naseaux. Je triple. Il fait mine de charger droit, s’arrête, se retourne et s’enfuit, nous offrant un postérieur que je crible de balles. Finalement, il tombera quelques centaines de mètres plus loin, victime de l’hémorragie résultante de mon acharnement.
Bien sûr, j’épargnai à mon père les détails de cette toute première confrontation avec un «big five».
J’avais environ quatorze ans et comme à chaque congé scolaire, je rejoignais le paradis sur terre : le campement de chasse de mon père, installé au bord du mythique Faro.
Accompagné du fils d’un pisteur, je marchais inconsciemment dans les traces de mon géniteur.
Un matin très tôt, je m’éloigne du camp et tombe très vite sur un splendide buffle solitaire. Je vise le défaut de l’épaule et tire, armé d’une 6,5X58… Le buffle « piqué », réagit. Il se retourne et nous cherche du regard. Hamadjoda, à peine plus âgé que moi, m’indique avec insistance un arbre sur lequel nous serions en sécurité… Il me presse pour que j’y grimpe. Toute cette scène sous l’oeil ahuri de notre buffle qui s’impatiente. Paniqués et inexpérimentés, nous nous hissons hors d’atteinte. Je prends l’initiative de tirer dans cette position inconfortable. Le buffle s’avance alors vers nous à la fois agacé et étonné. Je double sur son poitrail. Le buffle encaisse et se fige. Des bulles ensanglantées émergent de ses naseaux. Je triple. Il fait mine de charger droit, s’arrête, se retourne et s’enfuit, nous offrant un postérieur que je crible de balles. Finalement, il tombera quelques centaines de mètres plus loin, victime de l’hémorragie résultante de mon acharnement.
Bien sûr, j’épargnai à mon père les détails de cette toute première confrontation avec un «big five».
Je narrerai ensuite une charge surprenante. Du plus loin que je chasse, je n’avais personnellement jamais essuyé l’attaque d’un… phacochère !
Ce jour de février 2004, un ami chasseur flamand tire un phacochère au trophée très écarté. Ce dernier accuse le coup, tombe, se relève et disparaît rapidement dans la savane arbustive.
Nous entreprenons un travail de pistage au sang. Nous le suivons une demi-heure et perdons la trace aux abords d’un terrier étroit. Un bruit souterrain suivi d’un mouvement nous fait réaliser que la gueule du suidé affleure du terrier. Son immobilité et sa couleur l’avaient couvert à notre vue. Malheureusement pour lui, la largeur de ses canines l’empêche de pénétrer totalement dans le gîte. Instinctivement, dans un dernier sursaut de vie, il déboule nous faisant face à moins d’un mètre. Je tire sans épauler. La balle de ma 458 le délivre de ses tourments et nous délivre des nôtres…
Je narrerai ensuite une charge surprenante. Du plus loin que je chasse, je n’avais personnellement jamais essuyé l’attaque d’un… phacochère !
Ce jour de février 2004, un ami chasseur flamand tire un phacochère au trophée très écarté. Ce dernier accuse le coup, tombe, se relève et disparaît rapidement dans la savane arbustive.
Nous entreprenons un travail de pistage au sang. Nous le suivons une demi-heure et perdons la trace aux abords d’un terrier étroit. Un bruit souterrain suivi d’un mouvement nous fait réaliser que la gueule du suidé affleure du terrier. Son immobilité et sa couleur l’avaient couvert à notre vue. Malheureusement pour lui, la largeur de ses canines l’empêche de pénétrer totalement dans le gîte. Instinctivement, dans un dernier sursaut de vie, il déboule nous faisant face à moins d’un mètre. Je tire sans épauler. La balle de ma 458 le délivre de ses tourments et nous délivre des nôtres…
Nombre de mes confrères ont essuyé des charges d’animaux dangereux. Certains malheureux en ont péri. Nombre d’histoires héroïques contant des confrontations avec les fauves fascinent. Avec dérision, je terminerai en me gaussant d’avoir été le seul chasseur professionnel, à ma connaissance, chargé par un éland de Derby. Je me complais à collectionner ces moments d’exception qui me propulsent dans les méandres de Dame Nature… « Nobody is perfect »
C’était un début février. Nous pistions un troupeau d’une trentaine d’élands. Au bout de deux heures le contact se produit. Approche féline jusqu’à une termitière cathédrale couleur latérite, à quatre-vingts mètres du troupeau qui sieste à l’ombre. Deux mâles représentatifs à distance de tir. Notre attention se fige sur un splendide trophée en retrait derrière les autres. Nous l’observons une bonne demi-heure. Le vent vient rafraîchir ma nuque. Mauvais signe. Des naseaux se dilatent. Des yeux s’écarquillent. Quelques bêtes captent déjà notre effluve. Des sons rauques émanent de leur gorge. Le troupeau, inquiet, sort de sa léthargie et se déplace en ligne sur notre droite. Le superbe mâle se profile à distance de tir.
Mon chasseur appuie sur la détente. Muscles saillants, l’animal se cabre puis se fond dans le troupeau qui se disperse. Nous reprenons ses traces au sang.
Elles sortent bientôt de celles du reste de la horde.
Nous remontons notre taureau vingt minutes après mais il nous localise le premier et redémarre en boitant. Nous le rattrapons deux fois : il nous devance dans nos réflexes.
Au bout d’une heure, ses empreintes se dirigent vers un bas-fond dense en végétation. Nous le contournons pour tenter de le recouper : aucune trace de sortie ! J’aperçois alors un reflet auburn immobile à travers un écran épais de lianes enchevêtrées. Aucun doute, ça ne peut être que lui. Impossible d’estimer à quelle partie du corps cette tache cuivrée correspond. Après quelques instants d’hésitation, je demande au chasseur d’y placer une balle. L’éland réagit aussitôt, sortant du « bako » (galerie forestière), une épaule et une cuisse très abîmées. Il glisse droit devant lui, puis virevolte et nous charge tête basse, l’oeil déterminé. J’y réponds stupéfait, l’animal à moins de dix mètres. Il trébuche et s’allonge définitivement.
À la mécanique du geste succède la prise de conscience. La première balle (de 375) avait champignonné trop rapidement au contact avec l’articulation de l’épaule et n’avait pénétré que superficiellement la cage thoracique. L’animal acculé et exténué n’a eu d’autre recours que cette ultime charge…
C’était un début février. Nous pistions un troupeau d’une trentaine d’élands. Au bout de deux heures le contact se produit. Approche féline jusqu’à une termitière cathédrale couleur latérite, à quatre-vingts mètres du troupeau qui sieste à l’ombre. Deux mâles représentatifs à distance de tir. Notre attention se fige sur un splendide trophée en retrait derrière les autres. Nous l’observons une bonne demi-heure. Le vent vient rafraîchir ma nuque. Mauvais signe. Des naseaux se dilatent. Des yeux s’écarquillent. Quelques bêtes captent déjà notre effluve. Des sons rauques émanent de leur gorge. Le troupeau, inquiet, sort de sa léthargie et se déplace en ligne sur notre droite. Le superbe mâle se profile à distance de tir.
Mon chasseur appuie sur la détente. Muscles saillants, l’animal se cabre puis se fond dans le troupeau qui se disperse. Nous reprenons ses traces au sang.
Elles sortent bientôt de celles du reste de la horde.
Nous remontons notre taureau vingt minutes après mais il nous localise le premier et redémarre en boitant. Nous le rattrapons deux fois : il nous devance dans nos réflexes.
Au bout d’une heure, ses empreintes se dirigent vers un bas-fond dense en végétation. Nous le contournons pour tenter de le recouper : aucune trace de sortie ! J’aperçois alors un reflet auburn immobile à travers un écran épais de lianes enchevêtrées. Aucun doute, ça ne peut être que lui. Impossible d’estimer à quelle partie du corps cette tache cuivrée correspond. Après quelques instants d’hésitation, je demande au chasseur d’y placer une balle. L’éland réagit aussitôt, sortant du « bako » (galerie forestière), une épaule et une cuisse très abîmées. Il glisse droit devant lui, puis virevolte et nous charge tête basse, l’oeil déterminé. J’y réponds stupéfait, l’animal à moins de dix mètres. Il trébuche et s’allonge définitivement.
À la mécanique du geste succède la prise de conscience. La première balle (de 375) avait champignonné trop rapidement au contact avec l’articulation de l’épaule et n’avait pénétré que superficiellement la cage thoracique. L’animal acculé et exténué n’a eu d’autre recours que cette ultime charge…
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Cet article est extrait de notre ouvrage
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